Ma participation au blog d'Akynou
Sur son blog Akynou propose un atelier d'écriture intéressant : un dyptique par semaine. Un doublé d'un texte à illustrer par une photo et d'une photo inspirant un texte. Voilà mon texte de la semaine. Si vous aimez écrire, n'hésitez pas à participer.
http://akiyo1fr.free.fr/racontars_jeux/index.php?2006/05/15/351-session-4-black-blanc-ours
A quatre voix
J’ai décidé de me reposer. La journée a été fatigante. Je ne retrouvais plus ma chambre d'arbres, ni mon canapé, mon journal...disparu, mes pantoufles...envolées. Décidément mes jambes ne me portaient plus, c’est étonnant cette lourde torpeur qui m’envahit. Tant pis, je m’installe sur un terrain qui me paraît plus sûr, depuis que je suis petit j’ai horreur de l’herbe qui chatouille, grouillante de petits insectes qui fourragent dans mes poils accueillants. Je me laisse tomber lourdement sur le sol. Je vois d’étranges objets roulants au travers de mes yeux mi-clos, je n’ai pas la force de les rouvrir, tant pis, je crois que c'est l'heure de l'hibernation. La nature m'a rattrapé...
Pressée. Un coup sur l'accérateur, un virage vite un coup de frein. Comme d'habitude je suis en retard, la crèche va fermer. Qu'y avait-il de marqué sur l'autoroute ? Mieux vaut arriver tard que jamais. Attends, souffle. Ils n'ont pas tort. Tu vois ma puce sans moi. Relâche le pied, doucement, respire doucement. Mince, qu'est-ce que c'est, les lumières rouges des voitures. Encore un crétin qui ne connaît pas la route. Mais non, c'est arrêté. Tiens, il y a une grosse masse sur la route, un camion aurait perdu quelque chose ? Mais non...un ours ! Il aurait pu trouver un meilleur endroit pour roupiller ! J'aurai perdu moins de temps !
Que c'est beau cette région. Je ne regrette pas d'y avoir acheté un petit terrain. Le promoteur m'avait bien dit les choses. Oh ! Quel bel arbre, sûrement un sapin centenaire. Me mettre au vert, moi ! Qui l'aurait cru ! Sûrement pas les amis. Tu ne prends jamais de vacances, toujours de sortie le soir dans un tourbillon sans fin. Construire une vie privée, pas le temps et puis c'est mieux la diversité, disais-je cyniquement. Et puis, le choc, l'amnésie, le réveil dans cette chambre inconnue. Tout a basculé, on aurait dit un autre moi. Alors les copains, comprendre ma démarche, impossible. Je veux recommencer ma vie au début, sur ce petit terrain une maison en bois, avec mes mains. J'ai tout l'été pour cela. Cela me donnera l'occasion de renouer avec un passé révolu, lorsque mon père m'apprenait les gestes du bois. Tiens un embouteillage, on est pas sur le périph pourtant, ha, ha, j'en ris tout seul.
Tiens une bestiole sur la route, elle est drôlement grosse. Mais c'est un ours !!!! Qui se repose en plus ! Il n'y a qu'ici qu'on peut voir cela. C'est un bon présage pour mon installation, oui, je crois que je serai au repos ici.
Où est-il ? Je le savais, je l'avais dit à notre directeur. A chaque fois c'est la même chose. Pas dans une forêt ou cela va lui reprendre, l'idée de liberté. Dire que je l'ai élevé, depuis qu'il est né. Je ne pourrai me résoudre à le savoir là parmi ces bêtes sauvages qui n'en feraient qu'une bouchée. Je me souviens du premier biberon et du lait coulant sur ses joues. Et son premier fauteuil, il s'y installait comme moi. J'ai lui ai même appris à tourner les pages d'un journal, tout le monde en était baba. Toute cette sollicitude pour un résultat décevant : une forêt et hop ! Il se barre sans dire un mot. A chaque fois je l'ai rattrapé, j'ai même pensé qu'il avait oublié ces idées prêchées par le perroquet fraîchement rapporté d'Afrique. Tiens, un ralentissement mais que vois-je au milieu de la route. Ah c'est lui ! Ma grosse boule de poils ! Ma précaution, bien qu'impopulaire parmi le cirque, a été réussie : le somnifère dans sa tambouille ! C'est lui mon grand dadais. Allez, prévenir les autres et nous allons charger la bête endormie qui se réveillera dans sa cage sur son canapé. Un bien beau réveil !