Aïssata de Thierry Lenain : question d'inférence
Ce travail permet notemment :
- une lecture approfondie
- des techniques de recherches d'indices
- une formation de la pensée et de la formulation orale : argumentation
- une décentration par rapport à son propre point de vue : il peut en exister d'autres
- un intérêt accru pour découvrir la suite...
Dans ce cadre je propose depuis quelques années le début du roman de Thierry Lenain, en gommant les indices trop explicites (montrant que le narrateur est aveugle). Ils doivent découvrir ce qu'à l'enfant qui parle. Ensuite, à la place des lignes ils replaceront :
- "Ce n'est pas parce qu'on est aveugle qu'on est timide"
Et essaieront de trouver : comment tu lis avec les doigts
Je pense qu'un exercice du même type peut être proposé pour le livre d'Alex Cousseau, sauf qu'ils ne disposent pas d'indices mais devront inventer la suite, "qu'a donc cette petite fille qu'on surnomme la sorcière ?"-on n'est plus cependant dans la question d'inférence.
Je vous propose le texte :
La rentrée
Premier jour, ma présence dans la classe n’est évidemment pas passée inaperçue. Des chuchotements me parvenaient de toutes part... L’instituteur a invité chaque élève à se présenter. Quand mon tour est venu, j’ai parlé clairement.
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Ensuite le maître a proposé que je fasse une démonstration de mon ordinateur. Quand j’ai parlé dans mon micro et que mes paroles se sont affichées sur l’écran tout le monde a été épaté. Leur étonnement a continué de plus belle quand l’ordinateur a répété ce que je venais de lui dicter !
- Peux-tu aussi nous expliquer comment tu lis _____________________________ ? a demandé l’instituteur.
- Monsieur s’est exclamé un garçon. On pourra essayer ?
La première matinée s’est déroulée ainsi : moi qui expliquais, les autres qui voulaient apprendre.
Tout s’est compliqué à la cantine. Je m’appliquais à manger proprement. Etrangement, autour de moi, je n’entendais aucun couvert cliqueter, aucune bouche mâcher. Trop occupés à m’observer, les autres ne se rendaient pas compte de leur silence. Le silence peut être parfois comme un désert dans lequel je me perds. La tête m’a tourné. J’ai commencé à trembler, piquer ma fourchette à côté de l’assiette. De petits rires étouffés ont fusé. Une voix les a fait taire. Une voix qui m’a averti :
- Tu as laissé tomber un spaghetti sur ton pull.
Je me suis ressaisi. J’ai posé ma fourchette et j’ai tenté de repêcher le spaghetti.
- Plus à droite, m’a précisé la voix.
Mes doigts ont enfin trouvé la ficelle gluante. Je l’ai posée au bord de l’assiette.
- Il ne devait pas avoir envie d’être mangé...a repris la voix. Tant pis pour lui, il ira dans la poubelle !
A mon grand soulagement, tout le monde a éclaté de rire.
- Tu veux que je te serve à boire ? a proposé la voix.
Elle agissait sur moi comme une caresse.
- Oui, merci... Tu t’appelles comment ?
- Aïssata.
Loin des yeux près du cœur.
Thierry Lenain